Si la Côte d’Azur n’était jamais un véritable foyer intellectuel, elle a cependant attiré nombre d’écrivains parmi les plus grands ou les plus originaux, qui s’y sont installés le temps d’une saison ou d’une décennie, pour produire une œuvre loin des grisailles du nord ou des tourments de l’Histoire.
Pourquoi la Côte d’Azur? Les raisons invoquées tiennent souvent à la promesse d’un séjour bénéfique pour la santé. On vient se régénérer. On s’y exile aussi, mais l’exil y est plus doux qu’ailleurs.
Et si la Côte d’Azur n’est quasiment jamais une véritable «patrie», elle est par contre une terre d’élection que le travail de l’écriture transfigure. L’écrivain intériorise le paysage méditerranéen et s’approprie un imaginaire de ciels ensoleillés, de mer bleue, de montagnes et de silence. Le Midi revitalise les écrivains. La Côte d’Azur fonctionne comme un mythe collectif. Ce sera en la considérant «comme un pays imaginaire» qu’on s’approchera le plus de sa «réalité». Ce pays chimérique, c’est le bonheur retrouvé d’une vie rêvée.
Quels sont les écrivains qui ont marqué de leur empreinte l’image que nous avons de la Côte d’Azur? Y a-t-il un style propre à l’invention de ce mythe littéraire au succès duquel des Fitzgerald, des Cocteau, des Nietzsche, des Apollinaire ont contribué en y fixant leur propre légende? Dans La Côte d’Azur des Écrivains, il s’agit de montrer comment cette région a été propice à l’univers narratif, poétique ou philosophique.
Sur ce bord de mer, le génie du lieu se manifeste, l’émerveillement se produit, des œuvres prennent leur essor et s’achèvent. Tout le monde est venu sur la Côte d’Azur et il faut savoir que, pour plus d’un auteur, le littoral des AlpesMaritimes fut une formidable découverte et un réel appel à l’invention littéraire.
La Côte d’Azur des Écrivains présente un panorama inédit des écrivains qui ont fréquenté la Côte d’Azur entre le début du dix-huitième siècle et le milieu du vingtième. Les séjours de plus d’une centaine d’écrivains importants y sont décrits et environ cent cinquante autres auteurs sont mentionnés. Ce livre est composé d’articles classés par ordre alphabétique. Sa double forme de dictionnaire et de guide est une solution pratique qui permet au lecteur, d’une part, d’aller directement vers le sujet de son choix et, d’autre part, de lier la description du séjour littéraire à des lieux identifiés de façon aussi précise que possible.
La Côte d’Azur des Écrivains est édité par EDISUD, La Calade, RN7, Aix-en-Provence.
Plonger avec des crocodiles, nager avec des orques, visiter l’Irak... Pour ceux qui renoncent aux vacances «pépères», les offres touristiques sont de plus en plus ébouriffantes. Pourquoi ne pas se payer une bonne montée d’adrénaline pour les prochaines vacances? Ceux qui préfèrent les sensations fortes aux pieds en éventail n’ont que l’em barras du choit, car dans le «loisir frissons», on aime la surenchère. Pour preuve, si depuis quelques années, les bidonvilles des métropoles les plus pauvres de la planète comme Rio ou Mumbai font partie intégrante des circuits touristiques aujourd’hui les tours opérators envoient leurs clients directement dans des pays en guerre. Destination privilégiée: l’Irak! Les touristes s’aventuraient déjà dans la région du Kurdistan, mais pour la première fois ce moisci, un groupe d’Occidentaux en vacances – parmi lesquels plusieurs retraités – s’est baladé au cœur de la zone de conflit (Kerbala, Najaf, Bagdad).
En Europe de l’Est, certains voyagistes ukrainiens pro posent un crochet par le site de Tchornobyl au même titre que la découverte de Kyiv ou d’Odessa. Plus dingue encore, l’ancienne prison de Karosta, en Lettonie, vous accueille pour la journée et la nuit comme un détend cellule spartiate repas infect et interrogatoire musclé au programme...
Pour ceux qui préfèrent palpite au contact de la nature sauvage, aucun souci: au lieu de plonger avec des crocodiles en Australie, ils peuvent nager avec des orques en Norvège ou marcher avec des lions dans le parc national de Matusadona au Zimbabwe.
Si certains renoncent à regarder pousser les noix de coco sous le soleil pendant leurs congés et préfèrent se ficher une bonne pétoche ce n’est pas si surprenant à en croire JeanDidier Urbain, anthropologue et auteur de plusieurs ouvrages consacrés aux vacances. Les gens cherchent de l’exotisme, non plus dans la diversité des paysages ou des cultures, mais dans la prise de risque, le frisson. Ce n’est d’ailleurs pas tant l’aspect sportif qui importe que le frisson, explique le Français, avant de compléter notre petit programme pour vacanciers en mal de sensations: en Roumanie, une agence proposait de dormir dans le lit de Ceaucescu et en Hollande, une autre de vivre comme un SD.
Tant d’extravagance, c’est à se demander si plus que partager la misère des clochards ou se payer un têteàtête avec un saurien mangeur d’hommes, ce n’est pas le fait de pouvoir ensuite raconter son expérience hors normes autour de soi qui motive les gens. «C’est sûr que l’on gagne sur tous les plans, reconnaît JeanDidier Urbain. Il y a le côté ostentatoire, le prestige de pouvoir dire que son voyage était bien différent des autres. Mais, audelà de la morbidite que l’on cherche à assouvir dans certaines activités, c’est aussi une façon de redonner du sens à son existence. Ces activités ont une dimension thérapeutique: avoir l’impression de revenir de vacances comme d’autres réchappent d’une maladie grave, en appréciant la vie différemment.» Et si, malgré tout, vous optez pour des vacances farniente, n’allez pas croire que vous êtes has been. «C’est vrai que ce tourisme d’adrénaline existe et qu’il trouve preneur. Mais il reste tout de même marginal rappelle JeanDidier Urbain. Ce que les gens, en général, demandent en vacances, c’est être rassurés. D’ailleurs, même ceux qui recherchent le frisson veulent que les activités auxquelles ils par ticipent soient sécurisées. C’est tout le paradoxe: on veut de l’aventure dont la part d’imprévisible soit prévisible.»
Geneviève Comby, Le Matin Dimanche.
En 18... Un étudiant s'arrêta, rue Saint-Honoré devant la vitrine d'un marchand de tableaux. Dans cette vitrine était exposée une toile de Manet: La Cathédrale de Chartres. Manet n'était alors admiré que par quelques amateurs, mais le passant avait le goût juste; la beauté de cette peinture l'enchanta. Plusieurs jours il revint pour la voir. Enfin, il osa entrer et en demanda le prix.
— Ma foi, dit le marchand, elle est ici depuis longtemps. Pour deux mille francs, je vous la céderai. L'étudiant ne possédait pas cette somme, mais il appartenait à une famille provinciale qui n'était pas sans fortune. Un de ses oncles, quand il était parti pour Paris, lui avait dit: «Je sais ce qu'est la vie d'un jeune homme. En cas de besoin urgent, écris-moi.» II demanda au marchand de ne pas vendre la toile avant huit jours et il écrivit à son oncle.
Ce jeune homme avait à Paris une maîtresse qui, mariée avec un homme plus âgé qu'elle, s'ennuyait. Elle était un peu vulgaire, assez sotte et fort jolie. Le soir du jour où l'étudiant avait demandé le prix de la Cathédrale, cette femme lui dit:
— J'attends demain la visite d'une amie de pension qui arrive de Toulon pour me voir. Mon mari n'a pas le temps de sortir avec nous; je compte sur vous.
L'amie arriva le lendemain. Elle était elle-même accompagnée d'une autre. L'étudiant dut, pendant plusieurs jours, promener ces trois femmes dans Paris. Comme il payait repas, fiacres et spectacles, assez vite, son mois y passa. Il emprunta de l'argent à un camarade et commençait à être inquiet quand il reçut une lettre de son oncle. Elle contenait deux mille francs.
Ce fut un grand soulagement. Il paya ses dettes et fit un cadeau à sa maîtresse. Un collectionneur acheta la Cathédrale et, beaucoup plus tard, légua ses tableaux au Louvre. Maintenant l'étudiant est devenu un vieil et célèbre écrivain. Son cœur est resté jeune. Il s'arrête encore, tout ému, devant un paysage ou devant une femme. Souvent dans la rue, en sortant de chez lui, il rencontre une dame âgée qui habite la maison voisine. Cette dame est son ancienne maîtresse. Son visage est déformé par la graisse; ses yeux, qui furent beaux, soulignés par des poches; sa lèvre surmontée de poils gris. Elle marche avec difficulté et l'on imagine ses jambes molles. L'écrivain la salue mais ne s'arrête pas, car il la sait méchante et il lui déplaît de penser qu'il l'ait aimée.
Quelquefois il entre au Louvre et monte jusqu'à la salle où est exposée la Cathédrale. Il la regarde longtemps, et soupire.
D’après André Maurois.
Les études ne sont plus réservées aux jeunes et les facultés françaises ouvrent leurs portes aux plus âgés. L’Université inter-âge offre aux adultes qui en ont le temps, la possibilité de venir «encore» ou «enfin» se cultiver. Ce phénomène de société touche au moins 250 000 personnes dans toute la France. Pourquoi cet engouement pour le retour sur les bancs de l’Université?
L’espérance de vie s’est considérablement allongée. La retraite, voire la préretraite, marquant la cessation des activités professionnelles, libère des hommes et des femmes encore jeunes – 60 / 65 ans – des contraintes de la vie dite active: enfin, on a le temps, et ce temps, on a le souci de le remplir le plus intelligemment possible. La connaissance, quels que soient l’âge et la formation initiale de chacun, est le seul moyen d’élever son esprit et de cultiver à la fois sa personnalité et sa sociabilité.
Les cours proposés sontils les mêmes que ceux que suivent les «vrais» étudiants, ceux qui entrent à l’université pour préparer leur avenir et en sortent avec des diplômes qui sont censés leur ouvrir les portes de la vie active? Les amphithéâtres des facultés de Lettres, de Droit, de Médecine, de Sciences... voientils s’asseoir côte à côte le grandpère et le petitfils tout juste bachelier? L’université a compris que la course aux diplômes et à la réussite, avec le stress qu’elle engendre, n’est plus de mise pour ces étudiants d’un «autre âge». Si l’on fréquente l’université, ce n’est plus par obligation mais par plaisir, qui rime avec désir, et l’on s’y presse le jour de la rentrée solennelle (et pourquoi pas festive!). Voir des centaines de personnes – et les effectifs connaissent un rajeunissement certains – assises sur les bancs des «amphis», debout, massées dans les escaliers ou les entrées faute de places, ne saurait laisser indifférent. Les conférences succèdent aux cours, les ateliers aux labos : la littérature étrangère ou française, la philosophie, les arts, l’histoire des sociétés ou des civilisations, l’astronomie et la géologie... L’étudiant de l’université inter âge court vers la culture et, avec le même bonheur, vers les terrains de golf, les chemins de randonnées, les salles de gymnastique ou de yoga.
L’Université inter-âges n’auraitelle pas repris les recettes de Montaigne pour «faire un homme de bien»: «ce n’est pas assez de lui raidir l’âme, il lui faut aussi raidir les muscles»? Mais n’estil pas vrai que ces étudiants ont «encore» et «enfin» le temps pour le faire.
En France, au lendemain d’une journée de mobilisation nationale, la grève des cheminots se durcit. La compagnie française de Chemin de Fer prévoit un quart des trains à grande vitesse sur deux demain. Les douze raffineries de pétrole du pays sont toujours bloquées mais Eric Woerth se veut rassurant: le ministre du travail affirme qu’il y aura assez d’essence pourtout le monde; et pourtant, beaucoup de stations d’essence sontfermées, et les gens commencent à être en colère. Reportage à Paris de Laurence Théo.
C’est une grosse station service et elle affiche clairement le message: «Ici, plus de sans plomb, plus de diesel».
Mais les automobilistes nombreux ne voient pas toujours le panneau, alors ils s’arrêtent et repartent dépités, voire en colère, comme ce jeune motard exaspéré: «J’ai pas d’essence, je suis dans une merde pas possible». L’énervement se fait sentir aussi chez cette dame, agrippée à son volant: «Je cherche de l’essence, oui, on cherche de l’essence, on est... oui, oui, on cherche de l’essence». D’autres automobilistes sont inquiets, mais un peu plus philosophes: «J’ai fait trois stations qui sont fermées, et j’en ai vu une d’ouverte mais il y avait une queue de 500 mètres de long de voitures».
– Vous êtes inquiète? – Ben un petit peu oui, parce que là je suis bientôt dans le rouge. On verra bien, je vais peutêtre laisser ma voiture sur le trottoir. Ça fait 4 pompes à essence que je fais là, 4 pompes à essence et il y a pas de gasoil. Il y a pas de gasoil et je sais pas comment faire, demain je travaille et je sais pas comment faire. «Je connais pas bien la voiture, je sais pas combien de kilomètres elle peut faire dans le rouge».
Ne souhaitant pas s’exprimer au micro, le pompiste de cette grande station service de la porte de SaintCloud a vendu en une journée et demie l’équivalent de la quantité de carburant qu’il vend normalement dans la semaine, d’où la pénurie. Et ce soir, Brice Hortefeux, le ministre de l’Intérieur, a prévenu les grévistes que le gouvernement ferait évacuer les dépôts pétroliers bloqués par des manifestants. Le syndicat des routiers appelle les camionneurs à mener des opérations demain.
A six heures, il fallut réveiller Henriette à grands cris. Elle avait eu beaucoup de peine à s'endormir la veille au soir et maintenant elle était accablée de sommeil. La pluie tombait par rafales. L'averse était si dense que, de la fenêtre de l'étage, Henriette ne voyait même plus l'heure du cadran.
Sa mère l'appelait, la bousculait. Pendant que l'enfant mangeait sans appétit, la tête lourde et la bouche lente, ses trois petits frères faisaient cercle autour d'elle, avec un respect silencieux. Et quand elle eut fini, on lui remit son beau tablier des dimanches, couleur verte d'eau, avec des manches bouffantes. C'était un grand jour qui commençait, et elle avait le coeur un peu serré en passant son tablier.
Sa mère ouvrit la porte, considéra le déluge un bon moment, sans rien dire, soupira, vint à la grande armoire qui occupait tout le côté de la cuisine, l'ouvrit et en tira un parapluie de soie à manche immense avec une petite incrustation sur la poignée: un cadeau de mariage.
– Je te le donne, dit-elle à Henriette, mais fais-y attention. Et surtout, ne le perds pas. Henriette partit. Elle avait à marcher une heure. Elle serrait de la main gauche le manche du parapluie, ample comme une tente, et, de l'autre bras raidi, elle portait bien droit, pour ne rien renverser, un panier à couvercle avec son repas de midi.
C'est seulement quand elle fut dans la salle d'examen qu'elle se sentit de nouveau à son aise et à son affaire. La dictée lui parut sans difficultés; aux questions du vocabulaire et d'intelligence du texte, elle répondit très bien. Bousculée d'un examinateur à l'autre, elle trouva, l'après-midi très courte. Et elle ne fut pas surprise d'être reçue, mais le bonheur l'inonda quand elle se rendit compte qu'elle était classée première du canton. C'était cela qu'elle avait voulu de toute sa force depuis deux ans au moins: à cette seule condition ses parents consentiraient à travailler plus longtemps pour elle, à la laisser fréquenter le Cours complémentaire. Plus tard, elle serait donc institutrice. Elle aurait des livres toute sa vie. Elle étudierait tant qu'il lui plairait. Elle ferait un grand voyage peut-être, pendant les vacances, une fois ou deux ...
De joie, elle sautait en chantonnant sur le chemin du village. Subitement elle s'aperçut qu'il ne pleuvait plus, mais que le grand soleil d'été déclinait à l'horizon. Le vent avait tourné, il faisait beau. L'enfant montait vite la grande rue. Après le tournant, elle vit devant elle, à gauche, la vieille bâtisse, avec sa cage à poules devant l'ancienne écurie. Henriette franchit le seuil. Sa mère n'était pas dans la cuisine. On l'entendait à l'étage. De là-haut, penchée au-dessus de l'escalier, elle cria avec une voix sèche d'inquiétude: – Est-ce que tu l'as, au moins?
– Mais oui, maman!
La mère descendit, elle ne vit pas le geste de la fillette rayonnante qui s'avançait pour l'embrasser: elle jetait un regard circulaire sur les chaises, l'évier, les coins de la pièce.
Alors, la fillette comprit que sa mère était en peine non de son certificat, mais du précieux parapluie. Où l'avait-elle mis, en effet? Elle l'avait oublié à l'école du cheflieu, pour sûr. Les reproches s'enflaient. D'un coup, l'enfant aux rêves obstinés se sentit reprise par les réalités pesantes, par la vie mesquine et, s'enfuyant sans dire un mot dans la grange obscure, tout au fond, là où il y avait un tas de foin, elle laissa couler ses larmes.
D’après G. Cognot
«Tous les soirs, aux alentours de minuit, je suis obligée d’intervenir pour qu’elle raccroche son téléphone portable ... Et le matin, je dois frapper trois fois à sa porte pour qu’elle arrive enfin à se réveiller», se plaint Dominique, 47 ans, maman de Caroline, 16 ans. Scène habituelle chez les parents d’adolescents. Selon une enquête française de 2005, 78% des jeunes de 15 à 19 ans sont en dette de sommeil et 55% d'entre eux somnolent dès le matin. Avec parfois comme conséquences des troubles de la vigilance (concentration, mémorisation) pendant la journée. Le problème, c'est que les ados ont tendance à se coucher plus tard. Une façon d’affirmer leur autonomie face à leurs parents ... Mais pas seulement, précise le Dr Patricia Franco, spécialiste du sommeil à l’université de Lyon: «C’est aussi physiologique. A partir de la puberté, ils connaissent un retard de phase: leur mélatonine, l’hormone du sommeil, est sécrétée plus tardivement.» Parallèlement, ils ont toujours besoin de dormir neuf à dix heures par nuit ... Mission quasiment impossible avec les horaires du lycée.
Voici quatre règles d’or pour aider votre ado à mieux gérer son sommeil. Mais n’hésitez pas à consulter si ses troubles de l’attention et ses problèmes de somnolence se prolongent pendant un mois.
N’imposez pas de mesures draconiennes dès la rentrée, c’est la crise assurée. Attendez jusqu’aux prochaines vacances pour voir comment il s’adapte aux premières semaines de lycée. S’il n’a pas de mal à se réveiller, s’il ne somnole pas et s’il ne présente aucun problème d’attention dans la journée, laissez-le tranquille. Sinon, parlez-en.
«Expliquez-lui à quoi sert le sommeil, que ce n’est pas du temps perdu, que c’est important pour garder la forme, pour ses résultats scolaires et même son aspect physique», conseille la spécialiste. Pas sûr qu’il soit très attentif ... Mais il comprendra mieux pourquoi vous instaurez des changements.
Profitez des vacances pour évaluer la quantité de sommeil dont il a réellement besoin. «C’est une période sans contrainte, explique Sylvie Royant-Parola, présidente du réseau Morphée, consacré aux troubles du sommeil. Votre enfant aura donc naturellement tendance à se lever lorsqu’il est reposé.» Ces informations en main, vous pourrez ensuite adapter au mieux vos nouveaux aménagements.
Quelques règles d’hygiène de vie s'imposent pour l’aider à s’endormir plus facilement. Les boissons caféinées (café, cola, Red Bull ...) sont, bien sûr, à bannir en soirée. Par ailleurs, il peut être utile que l’adolescent pratique une activité physique en fin d’après-midi. «Cela améliore la qualité du sommeil, indique Patricia Franco. Mais pas après 20 h, sinon cela risque d’avoir l’effet inverse.» Les activités trop intellectuelles sont également à éviter avant le coucher. Inutile de vous leurrer, vous n’arriverez sûrement pas à instaurer un horaire fixe pour éteindre les lumières. Mais vous pouvez poser des limites: éteindre l’ordinateur et la télévision à 22 h, par exemple. «La luminosité de l’écran retarde la phase d’endormissement», précise Sylvie Royant-Parola. Plus facile à imposer lorsque ces appareils ne sont pas dans la chambre de l’ado.
Vous pouvez l’encourager à terminer sa soirée en lisant ou en écoutant de la musique. L’important, c’est de créer une ambiance calme, propice au sommeil. «S’il veut boire un verre de lait chaud ou une tisane, pourquoi pas, estime le docteur Franco. A chacun son rituel d’endormissement.» Mais mieux vaut éviter les médicaments, même homéopathiques.
«L’ado risque d’associer l’installation du sommeil à cette prise de médicament et de ne plus pouvoir s’endormir sans», prévient le docteur Royant-Parola. Et si ses troubles du sommeil étaient liés au stress? Si votre ado vous confie avoir quelques angoisses, vous pouvez faire appel à des techniques de relaxation ou de sophrologie pour l’apaiser avant de se coucher.
«Les ados ont souvent tendance à se lever au dernier moment, explique Patricia Franco. Ils arrivent au lycée en somnolant, donc leur corps n’a pas l’impression d’être vraiment réveillé et la mélatonine continue à être sécrétée, ce qui altère encore leurs rythmes de sommeil.» Soignez donc les réveils de votre enfant. «Tentez de lui imposer une douche, un petit-déjeuner et ne lésinez pas sur la lumière: il sera plus en forme.»
Les jeunes accumulent une dette de sommeil dans la semaine ... qu’ils ont tendance à rattraper le week-end. Seul bémol, quand ils se lèvent vers midi le dimanche, ils aggravent leur retard de phase. «C’est un cercle vicieux, souligne le Dr Franco. Leur pic de mélatonine sera décalé le dimanche soir, ils auront donc plus de mal à s’endormir et leur dette de sommeil se répercutera sur toute la semaine.» Réveillez votre ado au maximum à 9 h 30 - 10 h le dimanche matin, quitte à ce qu’il fasse une sieste d’une demi-heure en début d’après-midi. Ne le prenez pas par surprise, prévenez-le la veille et expliquez-lui pourquoi vous ne le laisserez pas dormir jusqu’au déjeuner, sinon il risque de vous recevoir fraîchement lorsque vous viendrez frapper à sa porte.
Corinne Soulay, La Vie, 18 septembre 2008.
Je rentrais de mon cours de trompette quand je l’ai rencontrée, au feu rouge de la rue de l’Ange. Elle avait une minijupe très serrée, des bas noirs, des cheveux verts et rosés. Elle avançait cahincaha sur des chaussures à ta lons hauts, hauts, tellement hauts qu’elle a perdu l’équilibre et s’est étalée au milieu du passage protégé.
Comme je suis très galant, je me suis précipité pour l’aider à se relever. Elle m’a fait un grand sourire et elle m’a dit:
‒ Merci, p’tit gars, t’es vraiment sympa. Pour te remercier, je vais faire quelque chose pour toi. Parce que je n’ai pas l’air comme ça, mais je suis une fée. Enfin, pas tout à fait, je n’ai pas encore mon diplôme. Mais je sais déjà plein de trucs. En quoi veuxtu que je te transforme? En poireau?
‒ Hein, quoi?
Je ne comprenais rien à ce qu’elle me voulait.
‒ Ah non, poireau, ça ne te dit rien? Dommage, c’est ce que je réussis le mieux. Et en taillecrayon, ça te plairait d’être transformé en taillecrayon?
‒ Écoutez, je ne tiens pas tellement à être transformé...
C’est vrai, quoi, je ne suis pas mal que cela: yeux bleus, cheveux blonds, petit nez même que ma grandmère m’appelle mon petit prince charmant...
‒ D’accord, d’accord, a dit la fée, pas de taillecrayon. En sucette à la menthe, alors? Ou en poteau électrique? En benne à ordures? Non? Vraiment? J’ai bredouillié:
‒ M... mer... merci beaucoup, c’est très gentil à vous, mais...
‒ Si, si, j’y tiens, atelle insisté. Mais il faudrait que tu te décides, tu sais, parce que je n’ai plus grandchose à mon répertoire. Ah si, j’oubliais ! Je peux aussi te transformer en fer à repasser. Oh, je suis sûre que ça va te plaire. Regarde...
Je n’ai pas eu le temps de protester. Elle a sorti sa baguette magique téléscopique, elle l’a agitée marmonnant des mots bizarres, et... zzzoup!, je me suis retrouvé coincé sur un rayonnage de supermarché, avec une étiquette, un prix et un certificat de garantie.
Et voilà! Je suis maintenant un fer à repasser. Fer à vapeur, double programme, avec thermostat réglable, si vous voulez tout savoir. Et j’attends. Comme les crapauds des contes de fée, j’attends qu’une belle princesse vienne m’embrasser. Et je redeviendrai, comme avant, un vrai prince charmant.
Alors, Mesdemoiselles, soyez gentilles: quand vous voyez un fer à repasser, embrassezle. Qui sait, c’est, peutêtre, moi. Et même si vous n’êtes pas très jolie, essayez quand même. Je vous promets, je vous épouserai. Si maman le permet.
Un officier de l'armée de Napoléon 1er décrit dans une lettre son voyage en Italie.
Un jour je voyageais en Calabre. C'est un pays de gens qui, je crois, n'aiment personne, et surtout les Français. J'avais pour compagnon un jeune homme de vingt ans.
Dans ces montagnes, les chemins sont rudes. Nos chevaux marchaient lentement. Mon camarade allait devant; un sentier qui lui parut plus court nous égara. Il faisait nuit noire quand nous arrivâmes près d'une maison fort noire. Nous y entrâmes. Là nous trouvons toute une famille de charbonniers à table, où du premier mot on nous invita. Mon jeune homme mangeait et buvait tranquillement; moi, j'examinais le lieu et la mine de nos hôtes. Nos hôtes avaient bien la mine de charbonniers, mais la maison ressemblait à un arsenal. Partout des fusils, des pistolets, des couteaux.
Mon camarade riait et causait avec tout le monde et, par imprudence il dit d'abord d'où nous venions, où nous allions, qui nous étions. Français, chez nos plus mortels ennemis, seuls, si loin de tout secours humain! Enfin il parla de sa valise, priant qu'on la mît sous son oreiller. Après le souper, on nous laissa; nos hôtes couchaient en bas, nous dans la chambre du premier étage. Une petite pièce sous le toit où l'on montait par une échelle. Sous le plafond étaient suspendues les provisions pour toute l'année. Mon camarade y grimpa seul, se coucha, la tête sur sa valise et s'endormit aussitôt. Moi, décidé à veiller, je fis un bon feu, et m'assis auprès. La nuit était déjà presque passée quand j'entendis au-dessous de moi notre hôte et sa femme parler et se disputer. En écoutant attentivement, j'entendis ces mots du mari:
‒ Eh bien! voyons, faut-il les tuer tous les deux? A quoi la femme répondit:
‒ Oui.
Que vous dirai-je? Tout mon corps était froid, je ne savais si j'étais mort ou vivant. Nous deux, presque sans armes, contre eux douze ou quinze. Et mon camarade mort de sommeil et de fatigue! L'appeler, faire du bruit, je n'osais; m'échapper tout seul, je ne pouvais; la fenêtre n'était pas haute, mais en bas deux gros chiens hurlaient comme des loups.
Quelques minutes après, j’entendis dans l’escalier quelqu’un et je vis le mari, sa lampe dans une main, dans l’autre un de ses grands couteaux. Il montait, sa femme après lui, disait à voix basse:
‒ Doucement, va doucement!
Puis il entre, son couteau dans les dents, et venu à la hauteur du lit, où le pauvre jeune homme était étendu, d’une main prend son couteau, et de l’autre ... Ah! ... il saisit un jambon qui pendait au plafond, en coupe un morceau et se retire comme il était venu.
Dès que le jour parut, toute la famille, à grand bruit, vint nous réveiller; on apporte à manger, un déjeuner fort bon. Deux coqs en faisaient partie, dont il fallait, dit la vielle femme, emporter l’un et manger l’autre. En les voyant, je compris enfin le sens de ses terribles mots: «Faut-il les tuer tous les deux?» D’après P.-L. Courier «Lettres»